Lancée en avril 2023 par le président de la République en réponse aux vives contestations suscitées par la réforme des retraites en France, la « mobilisation des 100 jours » fait référence à une période de 100 jours durant laquelle les membres du gouvernement français se déplacent dans toute la France pour aller à la rencontre des citoyens, écouter leurs préoccupations et répondre à leurs questions. Le désir d’Emmanuel Macron est de « renouer le lien social » ainsi que « la confiance ». Ce dernier souhaite notamment, par cette échéance forte, tourner la page des contestations en relançant les grands chantiers du travail, de la justice et de l’éducation.
Les « 100 jours », d’une autre manière
En réponse à cette mesure des 100 jours, les opposants qui ne souhaitent pas tourner la page tant que la réforme n’est pas abrogée organisent de leur côté les « 100 jours de Zbeul » (c’est-à-dire les 100 jours du bordel), notamment par la mise en place des « JO du Zbeul », où l’on recense et classe par points les rendez-vous politiques les plus perturbés en France : « casserolade » +1 point, annulation de la visite d’un ministre +3 points, etc.
De ce fait, les militants parisiens, après s’être mis d’accord sur le rendez-vous sur Twitter, ont convergé vers la gare de Lyon, scandant des slogans, tapant sur des casseroles (les fameuses « casserolades ») et tenant des pancartes pour « accueillir » le ministre
C’est ainsi que le 24 avril 2023, Paris a « gagné » de nombreux points lorsque la gare de Lyon est devenue le théâtre d’un rassemblement de militants pour « accueillir » le ministre de l’Éducation nationale, Pap Ndiaye, sur le quai de son train arrivant de Lyon. Ce même jour, la visite du ministre à l’INSPE avait déjà été interrompue par des militants lyonnais qui avaient défoncé la porte d’entrée de l’institut pour perturber le discours qui devait y avoir lieu.
Les militants ont utilisé le réseau social Twitter pour organiser ce rassemblement bruyant à la gare de Lyon, en partageant des informations sur l’heure d’arrivée du ministre et en appelant à une mobilisation grâce au hashtag #JOduzbeul.

De ce fait, les militants parisiens, après s’être mis d’accord sur le rendez-vous sur Twitter, ont convergé vers la gare de Lyon, scandant des slogans, tapant sur des casseroles (les fameuses « casserolades ») et tenant des pancartes pour « accueillir » le ministre et exprimer, par ce geste, leur mécontentement face à la politique du gouvernement français.
Le hashtag, lieu de rendez-vous à double tranchant
L’utilisation de Twitter et des hashtags comme #JOduzbeul dans le contexte des « 100 jours » soulève des questions importantes sur le rôle des réseaux sociaux dans la mobilisation politique et la participation citoyenne. En effet, cet événement met une nouvelle fois en avant l’impact des réseaux sociaux, et en particulier de Twitter, sur les mobilisations populaires : des opposants peuvent rapidement organiser des manifestations “Sauvages” et mobiliser des foules en quelques clics, depuis n’importe quelle région de France.
En effet, l’algorithme de Twitter, qui décide de l’ordre dans lequel les tweets apparaissent sur le fil d’actualités des utilisateurs, est conçu pour montrer aux utilisateurs les tweets qui sont les plus pertinents “pour eux”
Ce genre d’événement fort, favorisé par des hashtags faciles à utiliser et partager, renouvelle la question des limites des algorithmes qui ont tendance à créer des bulles politiques sur les réseaux sociaux qui peuvent se transformer en des mouvements militants parfois graves pour la sécurité de l’État (ex : La prise du Capitole sous Donald Trump, organisée sur Twitter et Facebook).
En effet, l’algorithme de Twitter, qui décide de l’ordre dans lequel les tweets apparaissent sur le fil d’actualités des utilisateurs, est conçu pour montrer aux utilisateurs les tweets qui sont les plus pertinents “pour eux”; c’est-à-dire que le contenu le plus susceptible de susciter leur intérêt, selon leurs interactions passées, est mis en avant. De cette manière, les utilisateurs ne sont exposés qu’à des opinions et des points de vue similaires aux leurs.
Une plateforme publique qui devient un group chat populaire.

Le tweet de Mc Danse pour le climat (@math_call) affirme sa participation aux JOduZbeul. On remarque que, grâce à l’utilisation d’un hashtag commun comme #JOduZbeul, @WhoIsBgBrthr et @math_call, qui se trouvent respectivement à Lyon et à Paris, peuvent devenir des lanceurs d’alertes en direct et organiser ou « participer » à un même événement, que ce soit de manière virtuelle ou concrète.
La plateforme Twitter devient alors une sorte de groupe de chat public commun, qui, dans ce contexte, permet à des militants de traquer un membre du gouvernement en déplacement et d’organiser un événement perturbateur depuis n’importe où en France.
Ces images fortes et choquantes d’un ministre qui doit être évacué de son train à la Gare de Lyon bondée de militants en colère posent la question des limites de sécurité et de réglementation des plateformes, notamment lorsqu’il s’agit de réserver un comité d’accueil à une personne visée. Les autorités peuvent alors être confrontées à des difficultés pour surveiller et contrôler les rassemblements nés des réseaux sociaux et toujours plus rapides.