Arte.tv dévoile une série-documentaire de quatre épisodes pour sensibiliser les spectateurs à la catastrophe écologique que représente le streaming en France et dans le monde.

Le 29 novembre dernier, Arte dévoilait sa nouvelle série documentaire intitulée « Frankenstream, ce monstre qui nous dévore ». La série est composée de quatre épisodes, de seize minutes chacun ; le tout se consomme donc très rapidement. Chacun des épisodes se penche sur un aspect particulier du streaming, de sa création à la place grandissante qu’il occupe, et les impacts écologiques qu’il engendre. Alors, proposer en streaming une série qui met en garde contre les effets mêmes de ce moyen de consommation, certains y trouveraient une pointe d’ironie. Le but étant de sensibiliser les internautes à la réelle portée d’un clic, qui semble pourtant inoffensif. On entend par « streaming » la lecture ou diffusion d’une vidéo ou d’un contenu audio, en ligne. Parmi les principaux sites ou applications de streaming, on retrouve YouTube, Netflix, Spotify ou encore Zoom, la plateforme de réunions en ligne popularisée pendant les périodes de confinement. Aujourd’hui, aucun média audiovisuel traditionnel ne peut en faire l’impasse. Ainsi, les diffuseurs essayent d’atteindre un plus grand public qu’une diffusion classique à la télévision. Le streaming, apparu en 1995, représente aujourd’hui 82% du trafic internet. Et si « naviguer sur internet » semble complètement inoffensif, en cause l’idée de dématérialisation totale mise en avant depuis des dizaines d’années par les entreprises du numérique, il en est tout autre. Cette industrie génère ainsi 17 000 000 de tonnes de Co2 par an, en France.
« Privilégier les heures creuses et une plus basse résolution »
À l’échelle mondiale, les résultats sont évidemment beaucoup plus élevés. L’université d’Édimbourg révélait en effet en 2017 que Spotify rejetait 180 mille tonnes d’équivalent Co2 à lui seul. C’est plus que l’industrie du CD et du DVD aux États-Unis au début des années 2000, dont le marché était alors conséquent. Comment faire pour réduire son empreinte carbone ?
Il y a plusieurs gestes qu’un internaute peut adopter, pour limiter la casse :
- Il vaut mieux privilégier le wi-fi à la 4G, plus énergivores.
- Il vaut mieux choisir une plus basse résolution qu’une qualité vidéo 4K.
- Si possible, on télécharge sa vidéo en heures creuses (de vingt-deux heures à six heures).
La différence est impressionnante : consommer 7 heures de vidéo en basse définition et en wi-fi correspond à l’équivalent de 20 kilomètres en voiture. C’est un bilan carbone équivalent à 133 kilomètres pour 7 heures de vidéo en HD, et en 4G, soit presque 7 fois plus.
Ce n’est pas la première fois que le streaming interroge : en mars 2020, lors du premier confinement, Netflix avait annoncé réduire la qualité de ses vidéos. Le but était alors de libérer de la bande passante. C’était la première fois que le sujet de la consommation du streaming en France devenait public, il représentait alors 80% du débit internet dans l’hexagone. Pour supporter ces nombreuses connexions et voyages de données, la France et notamment l’Île-de-France connaissent de plus en plus d’implantation de data-center.
« 372 kilomètres en voiture, 13 t-shirts et 11 pièces de bœuf »
La pollution numérique ne s’arrête pas au streaming. Elle est en effet produite à 80% par ce qu’on appelle les terminaux et leur production (téléviseurs, ordinateurs portables, téléphones, etc.). Les impacts écologiques changent d’un objet à un autre : fabriquer un ordinateur portable consomme quatre fois plus de Co2 que la fabrication d’un ordinateur de bureau par exemple. Bien que les consciences s’éveillent, et que des gestes eco-responsables soient encouragés, la pollution numérique connaît une croissance exponentielle ces dernières années, passant de 2 à 4% des productions de gaz à effet de serre dans le monde. Elle dépasse aujourd’hui l’aviation civile. On estime qu’elle pourrait atteindre les 6% d’ici 2030. Le problème est devenu sociétal, avec des initiatives politiques mises en place ces dernières années. En 2022, trois lois anti-carbones, ciblant le numérique, sont entrées en vigueur en France. Des instituts comme l’ADEME (Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie), avec le hashtag #NumériqueResponsable, visent à sensibiliser les citoyens. L’ADEME propose un simulateur pour que chacun calcule sa consommation et son impact carbone numérique. Si l’on y applique la moyenne de consommation de streaming, visioconférence et mails des français, on obtient un bilan carbone à l’année de 81 kilos de Co2. C’est l’équivalent de 372 kilomètres en voiture, la fabrication de 13 t-shirts et 11 repas avec du bœuf.