Does size matter ? La micro-influence sur Instagram

Toucher une large audience, via des célébrités ou des comptes aux nombreux abonnés, c’est l’objectif premier des marques sur Instagram. Pourtant, investir dans des influenceurs aux communautés plus modestes offre de nouvelles opportunités aux entreprises.

Nous préférons tous la baguette de la boulangerie à celle du supermarché. Mais au delà du goût, c’est le lien affectif – inversement proportionnel à la taille du commerce – qui explique notre comportement d’achat. Rapporté aux réseaux sociaux, c’est préférer une relation de proximité à un suivisme où l’univocité de la relation bannit tout échange possible. C’est ce que démontre l’enquête réalisée par l’agence de marketing digital Hello Society, propriété du New York Times. Selon sa fondatrice Kyla Brennan, « l’engagement se réduit drastiquement lorsque vous avez atteint un certain nombre de followers ».

Un problème de taille

L’influenceur est une personnalité ou une célébrité très active sur les réseaux sociaux, revendiquant une indépendance par rapport aux marques dont il fait la promotion. Journaliste, blogueur, mannequin… selon le site de l’agence de communication 1minute30, il serait davantage un prescripteur attaché à sa liberté d’expression, là où l’ambassadeur serait une sorte d’homme sandwich connecté, un panneau publicitaire ambulant. Problème : plus sa communauté est grande, plus il coûte cher à l’entreprise. Pour les comptes les plus connus, un seul post se chiffre souvent en dizaines de milliers d’euros, selon une étude de la startup américaine Captiv8.

Dans un entretien accordé au New York Times, Mae Karwowski, directrice de l’agence de communication digitale Obviously, confirme : « Il y a une telle saturation au sommet. Nous avons constaté une réelle volonté de travailler avec des influenceurs de plus en plus petits, car leur engagement est très important et nous disposons de la technologie pour travailler avec plus d’entre eux, suivre et mesurer ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. »

Less is more

Le terme micro-influenceur a donc plus à voir avec le taux d’engagement qu’il ou elle génère qu’avec un nombre d’abonnés défini. C’est pour cela qu’il recouvre une aussi large fourchette : de 30 000 à 500 000 abonnés environ. Selon Barett Wisman, chroniqueur pour le magazine Forbes, cette faune hétéroclite est d’abord leader d’opinion dans un secteur de niche : « Les micro-influenceurs se retrouvent dans presque tous les secteurs : ils peuvent être axés sur la santé et le bien-être, la cuisine et l’alimentation, l’entrepreneuriat ou la mode et la beauté, pour ne citer que quelques catégories importantes. »

Leur atout ? Ils ont déjà bâti l’audience recherchée par la marque, en produisant du contenu en interaction avec leur communauté, à grands renforts de stories et d’adresses à leurs fans. Ils choisissent donc consciencieusement avec qui collaborer.

 

Micros, boulot, dodo

Mais là encore, le marché se structure : Taylor Camp avec 37 000 followers sur son compte TheTieGuy, déclarait dans une interview avoir gagné 500 dollars pour deux posts liés à une marque de rasage. Ce passionné de mode s’est imposé en quelques années grâce à son expertise et son côté boy next door.

À l’inverse, malgré 35 000 followers sur son compte YouthOfArt, un jeune photographe parisien de 21 ans reste abonné aux cadeaux. Si il affiche distinctement son statut d’ambassadeur, il réalise aujourd’hui que l’investissement demandé ne vaut pas la contrepartie matérielle : « Je n’ai rien à dire, c’est la politique des marques. Je ne peux rien y faire, je n’ai pas assez d’engagement », confie-t-il. Plus que le nombre, c’est donc l’authenticité et la proximité qui intéressent désormais les annonceurs.

Demain, tous influenceurs ?

Les marques utilisent les influenceurs pour transformer leurs abonnés en autant d’ambassadeurs potentiels grâce à une technique éprouvée par les siècles : le bouche-à-oreille. Parce qu’il repose sur la confiance, chacun devient un prescripteur en herbe des discours et des produits de marque, dans une sorte de grande réunion Tupperware 2.0.

Image de contenus sponsorisés issue du compte Instagram d’Alexis Baker, comptant 2 600 followers.

Sur Instagram, ils ont déjà un nom : les nano-influenceurs. Le New York Times les définit comme des personnes qui comptent au plus quelques milliers d’abonnés, et qui sont prêtes à annoncer des produits sur les médias sociaux. Pour les annonceurs, ils sont plus faciles à approcher, à démarcher et à convaincre. Quant au produit, il gagne en légitimité, apparaissant souvent comme une simple recommandation amicale. En échange de commissions minimes ou de produits gratuits, les “nanos“ se font leurs zélés prosélytes. Selon Raphaël Demnard, co-fondateur de l’agence de communication digitale Sampleo, « les nano-influenceurs, ce sont ces gens comme vous et moi qui n’ont que quelques centaines d’amis sur Facebook mais qui sont susceptibles d’être crus sur parole lorsqu’ils recommandent un produit. »  

La market place française Octoly, qui permet aux influenceuses de recevoir des produits de beauté gratuitement, l’a bien compris. Créée en 2015, elle revendique aujourd’hui 250 marques partenaires (dont Dior, Sephora ou Clinique) et 11 000 influenceurs, cumulant plus de 700 millions d’abonnés.

Le marketing d’influence, futur de la publicité ?

Gonflé par les réseaux sociaux, ce bouche-à-oreille virtuel semble plus efficace qu’une simple affiche dans le métro. L’ère d’un soft advertising, moins intrusif et plus ciblé, est-elle advenue ? Pour rappel, le secteur de la publicité en ligne représentait 34,2% des investissements média en 2017, contre 27,2% pour la télévision. Si l’avenir est aux publicités ciblées, il est aussi au marketing d’influence. Car selon la théorie du désir mimétique développée par René Girard, « c’est dans le médiateur que mon désir trouve son origine : je désire toujours ce qui m’est indiqué comme désirable par un tiers, soit parce qu’il le possède, soit parce qu’il le désire ».

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